Le déconfinement des animaux
Pendant le confinement, les animaux enfin libres, ont pu reprendre leurs droits, le temps de quelques semaines.
Partout autour de la planète, des images ont montré des animaux se promenant dans les villes désertées par les humains. Les animaux marins ne font pas exception, et des animaux habituellement difficiles à observer ont pu être vus tout près des côtes, voire dans les ports :
- requin observé à Sete : https://www.youtube.com/watch?v=YdELjwdOrlQ
- rorquals observés au large des calanques de Marseille :http://www.leparisien.fr/societe/confinement-des-rorquals-observes-au-large-des-calanques-de-marseille-09-04-2020-8296962.php
- des otaries à crinière envahissent un port en Argentine : https://www.ladepeche.fr/2020/04/18/insolite-coronavirus-en-argentine-les-otaries-prennent-leurs-aises-dans-une-station-balneaire,8852836.php
Tous ces exemples montrent bien que les animaux ont besoin de plus de place. Quand les humains ne sont pas confinés, ce sont les animaux qui le sont.
En urbanisant et en investissant une large partie de la planète terre et des océans, nous privons les animaux de leur habitat, et plus grave encore, de leurs lieux de reproduction. En effet, plusieurs espèces ont besoin du littoral pour pouvoir se reproduire.
Difficultés de reproduction
Les plues connues sont les tortues de mer. En effet, les tortues marines femelles doivent aller sur la plage pour faire leurs oeufs.
Les tortues peuvent pondre plusieurs fois pendant la saison de ponte et retournent sur la même plage à chaque fois (c’est la plage où elles-mêmes sont nées). Le fait que les littoraux soient envahis par les humains pour le tourisme et le loisir, nuit grandement à l’Arribada (nom donné au Costa Rica pour le phénomène de reproduction massive et simultané des tortues olivâtres). https://blog.defi-ecologique.com/arribada-tortues-olivatres-ponte/
Pendant le confinement, des tortues luth ont enfin pu réinvestir la plage de leur naissance pour se reproduire, ce qui n’était pas arrivé depuis longtemps : https://positivr.fr/confinement-en-thailande-une-espece-rare-de-tortues-reapparait-soudainement/?utm_source=actus_lilo&fbclid=IwAR0Yh1jql61ze3ivWUyASpdbcSBSuf00fynzTqACRWN4OqJ68n4s_dKWGik
N’oublions pas que toutes les espèces de tortues marines sont menacées d’extinction (tortues luth, tortues vertes, tortues de Kemp, tortues imbriquées, tortues caouannes, tortues olivâtres, tortues à dos plat). Elles ont en effet été surpêchées à une époque. Et bien que protégées depuis, ces grandes migratrices subissent la pollution plastique et ont du mal à trouver de l’espace pour se reproduire. Leur laisser exclusivement certaines plages ou parties de plages peut donc grandement favoriser leur reproduction et empêcher ainsi le déclin de l’espèce.
Un autre animal marin nécessitant l’accès aux plages pour la reproduction est la limule. Méconnue, la limule est une espèce préhistorique. Elle est aujourd’hui elle aussi, menacée. Elle a pourtant rendu de nombreux services à l’homme, puisqu’à une époque, son sang était utilisé pour la médecine. Mais l’urbanisation grandissante du littoral rend leur reproduction difficile.
Il ne faut pas croire que ce genre de problématique soit réservé aux pays chauds. En France, pendant le confinement, sur le littoral breton, l’espèce protégée des gravelots (petits oiseaux de bord de mer) a fait ses oeufs sur certaines plages de Bretagne.
Les communes de Fouesnant et d’Erdeven, soutenus par l’association Bretagne Vivante, ont donc pris la décision d’interdire totalement l’accès aux plages concernées jusqu’à nouvel ordre, afin de protéger cet oiseau. https://france3-regions.francetvinfo.fr/bretagne/finistere/plages-fermees-preserver-oiseaux-demarche-concertee-1833734.html?fbclid=IwAR0WthWGqgXYCEjKkU8VgFawqpCquDQdClh_nhkmtLRy6m0q5e272f3-cL0
On ne peut que saluer et applaudir cette décision. Pour une fois la vie des animaux aura été reconnue plus importante que le loisir d’êtres humains!
Le confinement aura permis aux espèces de s’expanser l’espace d’un printemps, et aux humains de prendre la mesure du besoin des animaux.
Partager l’espace avec les animaux
Mais, il ne faudrait pas s’arrêter en si bon chemin. Les animaux nous ont montré leurs besoins d’espaces et de protection. Les décisions exceptionnelles comme celles prises à Fouesnant et Erdeven devraient devenir une normalité, une évidence. Nous pouvons observer dans les rares espaces totalement protégés, que la vie animale y est surabondante. Par exemple au Cap Fréhel les rochers de la Fauconnière, espace protégé de reproduction des oiseaux marins, est empli de vie à chaque période de reproduction. L’accès aux rochers est interdit. On peut observer les espèce à la jumelle depuis le Cap, sans les déranger. D’où une vie foisonnante.
Mais ces espaces totalement réservés aux animaux sont trop peu nombreux. Par exemple, il existe de nombreuses aires marines protégées autour du monde, mais seules 6% d’entre elles font l’objet d’une interdiction de pêcher (cf : article du 2 avril 2020 de la revue Nature). Si l’on veut laisser la nature reprendre ses droits, il ne faut pas se contenter d’actions de sensibilisation et de surveillance des espèces et de la surpêche, mais organiser de vrais havres de paix pour les animaux.
Ce genre de projets commence d’ailleurs à fleurir, sur terre surtout pour le moment :
Par exemple, Yann Arthus Bertrand a pour projet de racheter une dizaine d’hectares de la forêt de Rambouillet pour laisser la nature s’ épanouir librement et pouvoir ansi l’observer : https://positivr.fr/video-rendre-la-liberte-a-la-terre-limpressionnant-projet-de-yann-arthus-bertrand/?utm_source=actus_lilo
La ville de Grenoble a également pris la décision de gérer ses espaces verts de manière beaucoup plus respectueuse de la nature désormais : https://positivr.fr/grenoble-tire-les-lecons-du-confinement-et-opte-pour-le-reensauvagement-des-espaces-verts/
Une série documentaire a également été lancée le 5 mai 2020 pour explorer le “réensauvagement” : “Into the Rewild” : https://positivr.fr/into-the-rewild-la-precieuse-serie-documentaire-sur-le-reensauvagement/
Ce genre d’initiatives pourrait être étendu à chaque type de milieu (les forêts, les montagnes, le littoral, la mer, etc).
En ce qui concerne le milieu marin, il faudrait donc des espaces “sauvages” sur chaque type de milieu : la pleine mer, les estrans vaseux, sableux, rocheux, les plages, les dunes, les landes, les caps. Si ce type d’espaces sauvages parsemait notre littoral, nous pourrions voir la biodiversité foisonner à nouveau, observer plus facilement la faune et la flore et mieux les comprendre, et ainsi mieux les protéger.
Pour convaincre les communes, il ne faut pas voir cela comme un manque à gagner touristique, mais développer au contraire de l’écotourisme. L’article “Rebuilding marine life” de la Revue Nature du 04 avril 2020 insiste d’ailleurs sur le fait que le financement de la protection et de la régénération des océans pourrait engendrer un retour sur investissement important, grâce à l’écotourisme, et la création de nombreux emplois.
On peut citer l’exemple du Parc du Marquenterre dans la Baie de Somme : “Le Parc du Marquenterre est un vaste espace naturel protégé, interconnecté avec l’estuaire. Des milliers d’oiseaux transitent en baie de Somme chaque année et font pour l’occasion une halte dans les plans d’eau du parc. Les oiseaux sont sauvages, des aménagements bien étudiés permettent aux visiteurs de les observer sans les déranger.” : http://www.marquenterrenature.fr/visite-libre-parc-marquenterre/.
Alors si vous êtes en faveur d’espaces naturels réservés sur le littoral, et en mer, n’hésitez pas à partager cet article, à le diffuser largement, que chacune de vos voix se fasse entendre.
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